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Green Economie

Vacances écolos: Comment faire sa valise éco-responsable

VACANCES ÉCOLOS (3/5) - Filets de pêche, bouteilles en plastique, voiles de bateau… Tour d'horizon de ces marques qui innovent dans les textiles écolo qui pourraient garnir votre valise pour vos vacances.

Chaque minute, l’équivalent d’un camion poubelle de plastique est déversé dans l'océan.

Chaque minute, l’équivalent d’un camion poubelle de plastique est déversé dans l'océan.

Et si pour partir en vacances vous mettiez vos affaires dans des sacs faits… en voile de bateau. C'est l'idée de l'entreprise ‘’Les toiles du large’’ qui propose une gamme étendue de sacs, polochons, et cabas pour la plage conçue et fabriquée dans des voiles de bateau qui ont toutes navigué. Afin d'éviter d’encombrer davantage les déchèteries Anne Couderc a voulu mêler l’utile au sentimental en récupérant ce matériau non recyclable. Et valoriser ainsi des voiles qui ont navigué, trop abimées pour continuer à braver la mer, pour en faire des sacs. Depuis 16 ans maintenant elle recycle ces toiles pour ‘’leur donner une deuxième vie’’ –"plus de 95% est recyclé’’–, comme elle aime bien le dire. Chaque année ce sont ‘’plusieurs milliers de m² qui sont traités’’. Leur origine? Les matériaux sont obtenus auprès de particuliers, de plaisanciers, de régatiers ou encore de petits clubs de voile. Mais Anne Couderc travaille également avec le chantier naval de la Ciotat ou elle se procure des voiles professionnelles et donc beaucoup plus grandes.

Et pour les sentimentaux qui n’arrivent pas à abandonner leurs voiles usagés, la fondatrice des "toiles du large" propose de leur fabriquer un sac dans la toile qu'ils donnent. Le reste des matériaux entrant dans la fabrication des produits provient de France et d'Europe. Si Anne Couderc signe le design des sacs, la réalisation s'effectue dans des structures d’aide par le travail (ESAT) de la région de Marseille. Ces structures, offrent aux personnes handicapées des activités à caractère professionnel et un soutien médicosocial et éducatif. Ajoutant ainsi une touche sociale au geste écologique. Comme les "toiles du large", d'autres entreprises innovent dans les tissus écologiques, de quoi donner des idées au moment de faire sa valise pour partir en vacances.

Un maillot de bain en filet de pêche

Si vous partez à la mer, il vous faudra évidemment mettre un maillot de bain dans la valise (en voile?). Et pourquoi pas un maillot fabriqué avec des filets de pêche? Un geste bon pour l'environnement puisque 70% de la pollution marine provient du matériel de pêche laissé au fond des océans, jeté, ou encore coincé dans les récifs. De ce fait, en 2011, Claire Mougenot décide de fonder ‘’Luz Collections’’: des maillots de bain et une gamme de sport fabriqués avec des filets, faits de polyester et recyclés. Elle travaille en partenariat avec plusieurs entreprises qui se chargent de les récupérer pour ensuite les refondre et les transformer en fils. ‘’On utilise cette nouvelle matière pour coudre directement nos produits.’’

Une démarche écologique qui a mis du temps à toucher le public. ‘’Quand on s’est lancé en 2011, les gens n’étaient pas du tout sensibles à l’écologie, ils affectionnaient nos coupes et nos couleurs, c’était plus pour l’esthétisme du produit ‘’, explique Claire Mougenot. Mais depuis la crise du coronavirus, elle sent un engouement et une prise de conscience écologique grandissante. En effet en 2020,''Luz Collections" a vendu 25.000 produits, soit cinq fois plus qu'en 2015. Un engagement qui permet de lutter contre les 640.000 tonnes de filets de pêche qui finissent abandonnés en mer chaque année, selon une étude de l’ONU parue en 2019. Soit l’équivalent de 20.000 camions poubelles. Ce qui cause la mort de nombreux animaux marins qui se retrouvent prisonniers et tués dans ce qu’on appelle ‘’la pêche fantôme’’.

Claire Mougenot a toujours travaillé avec des matériaux recyclés, bios ou upcyclés, c'est-à-dire en utilisant le tissu dans son intégralité, en se servant des chutes "pour faire de petites collections pour ne pas gâcher de matière’’. Selon le ministère de la Transition écologique ce sont 600.000 tonnes de textiles, linge de maison, chaussures qui sont mis sur le marché en France chaque année à destination des ménages, soit près de 10 kilos par an et par habitant. Une fois usés, ces textiles sont abandonnés ou jetés avec les ordures ménagères alors qu’ils pourraient être, soit réemployés ou réutilisés s’ils sont en bon état, soit recyclés s’ils sont abîmés. C’est pourquoi Claire Mougenot a également décidé de se mettre en collaboration avec une association: ‘’redonner’’. Les clients peuvent déposer des vêtements de toutes marques, de toutes sortes, pour les recycler. Afin de les inciter, ‘’toute personne qui recycle un vêtement obtient un bon de réduction sur les produits de Luz Collections’’, ajoute la fondatrice de la marque.

La bouteille en plastique... pour faire des vêtements

Les filets de pêche ne sont pas les seuls responsables de la pollution maritime. On dénombre ainsi 5.000 milliards de morceaux de plastique qui flottent actuellement dans nos océans selon National Geographic. Dans le monde, 73% des déchets sur les plages sont en effet du plastique: bouteilles, bouchons, emballages alimentaires, sacs… Les estimations sur la durée de vie du plastique vont de 450 ans à l'infini. Céline Rodriguez, a donc décidé avec son mari, Daniel, styliste, de fonder WASTENDSEA, une marque de tee-shirts et sweats fabriqués à partir de plastique recyclé, récolté au fond des océans. La marque est en collaboration avec Sequal Initiative, une association qui travaille avec des pêcheurs. Lorsqu’ils remontent des plastiques à la surface dans leurs filets, l’association les récupère, trie les déchets, les nettoie et les transforme en fil. Qui sera ensuite métamorphosé en textile. "Tous nos vêtements sont fabriqués avec cette matière-là’’, explique Céline Rodriguez. Les premiers à commercialiser ce genre de produit en France, WASTENDSEA a fait de nombreux essais. ‘’On s’est rendu compte que la meilleure solution pour que le produit soit à la fois confortable et qu'il dure dans le temps c’était de mettre dans le tee-shirt, 50% de ce plastique et 50% de coton bio.’’ Sur le pull, l’utilisation du plastique est beaucoup plus complexe, nous indique Céline, ‘’nous mettons plutôt 25% de plastiques recyclés, et 75% coton bio’’.

Un tissu plus résistant, créé pour durer dans le temps insiste la co-fondatrice: ‘’Vous pouvez le laver autant de fois que vous voulez il ne bougera pas, la matière restera la même.’’ Pour la couleur, pareil. Le plus souvent les vêtements sont colorés avec de la teinture. ‘’Nous, nous passons la fibre au rouleau’’, ce qui l’imprègne profondément. On peut laver et relaver le vêtement, la couleur ne partira pas. Depuis 2015, sur près de 7 milliards de tonnes de déchets plastiques produits, seulement 9% ont été recyclés. Dans le monde, un million de bouteilles en plastique sont vendues chaque minute.

Des combinaisons de plongée incrustées 

Et pour vous tenir chaud pendant les nuits fraiches cet été, deux sœurs proposent quant à elles des pulls avec des combinaisons de plongée recyclées. En 2018 Marie Paillardon et sa sœur lancent leur projet, une idée d’enfance: recycler le néoprène présent dans les combinaisons de plongée, de surf ou encore de voile. C’est comme ça que nait ‘’Téorum’’ la première marque française à recycler cette matière, ce que déplore Marie Paillardon, une des fondatrices: ‘’Nous avons monté cette filière de recyclage qui n’existe malheureusement pas du tout aujourd’hui.’’ Lorsque les combinaisons sont hors d’usage, trouées, blanchies ou qu’elles ont une fermeture éclair déchirée elles sont jetées puis envoyées à l’enfouissement ou l’incinération. ‘’ Ce qui est extrêmement mauvais puisqu’il s’agit de matériaux issus de la pétrochimie’’ ajoute Marie Paillardon. ‘’Il y avait un non-sens car souvent, les pratiquants de sport d’eau sont vraiment attentifs à l’environnement marin et veulent le protéger et pourtant leurs combinaisons sont faites de matières qui ne sont pas du tout recyclable’’. Des valeurs qui sont maintenant partagées, puisque depuis sa création en 2018, "Téorum" double son chiffre d'affaires chaque année. Au départ ''Téorum'' proposait une gamme de cinq produits, aujourd'hui la marque s'est développée et en compte 14 différents.

Les deux sœurs décident alors d’offrir une seconde vie à ces combinaisons en les incrustant par morceaux sur les coudes et épaules de leurs pulls, et sur leurs tee-shirts. Pour inciter les gens à rapporter leurs vieilles combinaisons plutôt que de les jeter, ‘’on a mis en place des systèmes de partenariats avec des clubs et des enseignes spécialisées comme Décathlon ou Le Vieux Campeur, pour que les clients puissent déposer toute l’année leurs combinaisons hors d’usage’’, et se voient ensuite proposer une réduction sur l’achat d’une combinaison neuve en contrepartie. Les vieilles combinaisons sont alors directement envoyées à Téorum, explique Marie Paillardon. Les sœurs font également des tournées de collectes dans les associations et clubs, une à deux fois par an dans toute la France pour récupérer toutes les combinaisons hors d’usages.

 

Autant de marques qui cherchent à se développer toujours plus lors de la saison estivale pour lutter contre la pollution des océans, et favoriser l'économie circulaireLa loi du 10 février 2020relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire entend accélérer le changement des modèles de production et de consommation afin de réduire les déchets et préserver les ressources naturelles, la biodiversité et le climat. Selon l'Institut National de l'Economie Circulaire, aujourd'hui 80% des textiles utilisés dans l’Union européenne ne sont pas recyclés. La découpe des pièces de chaque vêtement génère entre 20 et 30% de chutes de tissus. Si les designers repensent la coupe de nos vêtements, ils pourraient optimiser l’usage du tissu, voire créer des patronages zéro déchet.

 

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